L’allégorie de la Victoire (en latin Victoria) est l’équivalent romain de la Nikê grecque et personnifie la victoire.
Elle est le plus souvent représentée par une déesse ailée, vêtue d’une longue robe romaine et nu-tête, qui tend une couronne de laurier, emblème de victoire qu’elle est censée offrir au gagnant. Elle peut aussi tenir une palme, insigne du gagnant dans les compétitions sportives et les jeux du cirque. On la représente aussi élevant des trophées, ou gravant sur un bouclier les exploits des guerriers.
Les Romains en firent des statues pour décorer leurs monuments et commémorer leurs victoires, et aussi des statuettes.
Ainsi s’étaient préparées, sous la République, les brillantes destinées d’un culte qui devait être particulièrement cher à l’Empire. Malgré la part importante de l’influence hellénistique dans l’évolution de ce culte, les conditions mêmes dans lesquelles il se développe lui conservent un caractère éminemment romain. Ce qui avait fait l’originalité de la Nikê grecque, c’était d’être divinité guerrière et divinité pacifique. En Grèce, les prix remportés aux grands jeux, dans les courses, dans les luttes, dans les concours, n’étaient pas moins glorieux que les récompenses attribuées à la valeur militaire. À Rome, où les citoyens ne sont que spectateurs et où prédominent de plus en plus les jeux du cirque, les fonctions agonistiques de la déesse ont perdu leur principal intérêt. Elles auraient perdu toute signification nationale, si elles ne relevaient indirectement de ses attributions guerrières. Victoria participait à la pompa circensis ; elle y occupait même le premier rang, du moins au temps d’Auguste ; mais la pompa circensis renouvelle la pompe du triomphe, qui primitivement coïncidait avec le début des jeux votifs. Victoria préside aux jeux, et son image, dressée sur de hautes colonnes, orne la spina des cirques ; mais la plupart des jeux sont liés à l’histoire guerrière de Rome, et beaucoup ont pour origine la commémoration de victoires. La Dea Victoria est donc une divinité presque exclusivement militaire, associée par Rome à la gloire de ses armes, associée par les derniers généraux de la République au succès de leurs ambitions, associée par Auguste à la fondation de l’Empire.
C’est Auguste, en effet, qui, après la bataille d’Actium, institue la Victoire comme divinité tutélaire du régime nouveau, custos imperii virgo. Dans la Curie Julia, édifiée par Jules César, mais dédiée seulement par Auguste en -29, le prince rend à la déesse un éclatant hommage. Érigée en acrotère au sommet du fronton, la Victoire domine les rostres et le Forum. Dans la salle des séances, elle se dresse au-dessus d’un autel et semble présider aux délibérations du Sénat. Sur cet autel chaque sénateur, avant de gagner sa place, offre à la Victoire l’encens et le vins. Une fête annuelle, fixée au 28 août, rappelle la dédicace de l’Ara Victoriae (l’Autel de la Victoire). Le 3 janvier, quand le Sénat prononce les vœux solennels pour le salut de l’Empereur, toutes les mains se tendent vers la déesse qui a sauvé le monde. Vers elle aussi se tendent les mains, lorsqu’à l’avènement d’un nouveau prince on lui jure fidélité.
Représentation: La plus ancienne effigie d’une Victoire sur les monnaies romano-campaniennes, dès la seconde moitié du ive siècle av. J.-C., reproduit un type hellénistique : demi-nue, la déesse attache une couronne de laurier à une longue palme. Le bige et le quadrige de la Victoire, qui semblent imités de monnaies siciliennes, la Victoire couronnant un trophée, qui est imitée de monnaies de Capoue et du Bruttium, deviennent des types monétaires de la République romaine dès la fin du iiie siècle av. J.-C. Il faut arriver à l’époque de Jules César et de Pompée pour rencontrer la Victoire qui porte un trophée sur l’épaule. Après la bataille de Pharsale en -48, un magistrat monétaire fit frapper un denier au type de la Victoire chargée d’un trophée, symbole de victoire, et tenant un caducée, symbole de paix.
À la fin de la République, on voit sur de nombreuses monnaies un buste ailé de femme, qui ne peut être que le buste de Victoria ; mais la tête représente souvent un portrait, de caractère nettement individuel (portrait de Calpurnia, femme de César, portrait de Fulvia, première femme de Marc Antoine, portrait de Scribonia, première femme d’Octave). Ainsi se préparait la tradition qui donne les attributs divins aux effigies d’impératrices.
Après la bataille d’Actium, on dédia beaucoup de statues à la Victoire. La numismatique d’Auguste en reproduit quelques-unes : Victoire tenant palme et couronne, debout sur une proue de navire ; Victoire tenant couronne et vexillurn militaire, debout sur un globe ; Victoire tenant un bouclier rond posé sur un cippe ; Victoire brandissant palme et trophée. Mais la plus célèbre fut celle que le prince consacra dans la Curie en l’an 29 ; c’était une Victoire s’élançant d’un globe, offrant de la main droite une couronne et portant dans la gauche un trophée. Elle provenait de Tarente, où Pyrrhus Ier l’avait fait ériger pour commémorer son succès d’Héraclée (280). Auguste se contenta de flanquer le globe de deux capricornes, son horoscope, et peut-être de modifier les armes de la panoplie.
« 44 Victoria – Neues Palais Sanssouci Steffen Heilfort » par Steffenheilfort — Travail personnel. Sous licence CC BY-SA 3.0 via Wikimedia Commons.