
Brutus
Contexte et jeunesse
Marcus Junius Brutus est né vers 85 av. J.-C. dans une famille patricienne, les Junii, qui revendiquaient une ascendance remontant aux origines mythiques de Rome. Sa mère, Servilia, était une femme influente, et son père, Marcus Junius Brutus l’Ancien, fut tué par Pompée lors d’une rébellion en 77 av. J.-C. Élevé dans un milieu cultivé, Brutus reçut une éducation soignée, influencée par la philosophie stoïcienne et les idéaux républicains. Son oncle, Caton le Jeune, fervent défenseur de la République, joua un rôle clé dans sa formation idéologique.
Relation avec César
La relation entre Brutus et Jules César est fascinante et ambiguë. Servilia, la mère de Brutus, fut l’une des maîtresses les plus importantes de César, et certains historiens antiques (comme Suétone) ont spéculé que César pouvait être le père de Brutus, bien que cela soit improbable vu les dates. César traitait Brutus avec une affection particulière, le nommant à des postes prestigieux malgré son jeune âge. Pendant la guerre civile entre César et Pompée, Brutus choisit initialement le camp de Pompée, mais après la défaite de ce dernier à Pharsale (48 av. J.-C.), César lui pardonna et l’intégra dans son cercle, lui offrant notamment le gouvernement de la Gaule cisalpine.
L’assassinat de César
Malgré ces faveurs, Brutus fut convaincu par d’autres sénateurs, comme Cassius Longinus, que César aspirait à la monarchie, un anathème pour les républicains. Le 15 mars 44 av. J.-C. (les Ides de mars), Brutus participa à l’assassinat de César au Sénat. Selon Plutarque, lorsque César vit Brutus parmi les conjurés, il aurait murmuré « Et tu, Brute ? » (ou en grec, « Kai su, teknon ? » – « Toi aussi, mon fils ? »), bien que cette phrase soit probablement apocryphe. Ce moment, immortalisé par Shakespeare, symbolise la trahison personnelle autant que politique.
Conséquences et chute
Après l’assassinat, Brutus et les conjurés espéraient restaurer la République, mais leur acte provoqua le chaos. Marc Antoine, allié de César, exploita l’indignation populaire pour retourner l’opinion contre les assassins. Brutus et Cassius s’enfuirent à l’est, levant des armées pour affronter le Second Triumvirat (Antoine, Octavien et Lépide). En 42 av. J.-C., lors de la bataille de Philippes en Macédoine, leurs forces furent écrasées. Brutus, voyant la défaite inévitable, se suicida en se jetant sur son épée, mettant fin à la résistance républicaine.
Héritage
Brutus reste une figure controversée : un traître pour certains, un héros de la liberté pour d’autres. Dans la Divine Comédie de Dante, il est placé dans le neuvième cercle de l’Enfer, aux côtés de Judas, pour sa trahison. À l’inverse, les républicains modernes l’ont parfois idéalisé comme un symbole de résistance à la tyrannie. Shakespeare, dans Jules César, le dépeint comme un homme honorable mais tragiquement manipulé, « le plus noble des Romains » selon Marc Antoine.