Sors : La Divinité Mineure de la Chance et du Destin dans la Mythologie Romaine

Sors : La Divinité Mineure de la Chance et du Destin dans la Mythologie Romaine Dans le panthéon romain, souvent dominé par les figures majestueuses d’un Jupiter ou d’une Minerve, on trouve une myriade de divinités mineures qui régissaient des aspects plus spécifiques et quotidiens de l’existence. Parmi elles, Sors (au pluriel, Sortes), la divinité de la Chance et du Tirage au Sort (le « Sort »), occupe une place fascinante, bien que parfois ambiguë. Une Personnification de l’Aléatoire Le terme latin Sors se traduit littéralement par « sort », « part » ou « lot ». Contrairement à Fortuna, la grande déesse de la Fortune, dont les caprices englobaient la chance et la malchance à l’échelle d’une vie ou d’une nation, Sors représentait l’aspect mécanique, immédiat et imparti du destin. Il s’agissait de la part que l’on recevait lors d’un partage, du résultat d’un tirage au sort, ou du présage obtenu par des tablettes oraculaires. Sors n’était pas nécessairement bon ou mauvais, mais incarnait le principe de l’aléatoire et de la répartition. Denier Plaetoria – Marcus Plaetorius Cestianus Le Rôle dans la Divination : Les Sortes C’est dans le domaine de la divination que Sors était le plus vénéré, notamment sous sa forme plurielle, les Sortes (les « Sorts »). Ces « Sorts » étaient des petits objets (tablettes de bois, jetons, osselets) portant des inscriptions prophétiques. Le consultant posait une question, et la tablette choisie (souvent au hasard par un enfant ou un prêtre) délivrait une réponse ou un conseil divin. Ce système était notamment célèbre dans le sanctuaire de Préneste (Praeneste), où l’on trouvait l’un des plus illustres oracles de l’Italie antique : les Sortes Praenestinae. Selon la légende, ces « Sorts de Préneste » auraient été découverts miraculeusement dans un puits ou une crevasse. Ils étaient conservés dans une boîte de chêne sacré. La renommée de cet oracle était telle que même des empereurs et des figures importantes venaient y chercher un éclairage sur l’avenir. Le culte était très localisé, mais son influence était nationale. Sors et sa Parenté Divine Bien que Sors fût souvent considérée comme une entité indépendante, les auteurs romains la rattachaient parfois à d’autres figures du destin, notamment la déesse Fortuna. Dans certaines représentations tardives ou littéraires, Sors est vue comme un aspect ou une fonction de Fortuna, spécifiquement celle qui distribue les parts de la vie de manière impartiale. On la rapprochait également des Parques (Fata, les Destins), mais tandis que les Parques filaient et coupaient le fil de la vie, Sors se contentait de répartir le lot de départ ou l’issue immédiate. Le Message de Sors pour le Romain La divinité Sors rappelait aux Romains que, bien que la Fortune (Fortuna) soit inconstante et imprévisible, il existe des moments où l’issue est purement et simplement une affaire de chance et de tirage au sort, échappant à la volonté humaine et même parfois à l’influence directe des grands dieux. Aujourd’hui, Sors reste un exemple éloquent de la complexité du panthéon romain, qui n’hésitait pas à personnaliser même les concepts les plus abstraits de la vie quotidienne pour les intégrer à la sphère du sacré.
Le Sanctuaire de la Fortuna Primigenia à Préneste : Un Chef-d’Œuvre Romain d’Architecture Théâtrale

Le Sanctuaire de la Fortuna Primigenia à Préneste : Un Chef-d’Œuvre Romain d’Architecture Théâtrale Le Temple de Préneste (aujourd’hui Palestrina, Italie) n’est pas un temple ordinaire ; c’est un sanctuaire colossal et spectaculaire dédié à la déesse Fortune (Fortuna Primigenia). Il est l’un des exemples les plus impressionnants de l’architecture romaine de la période républicaine tardive (IIe siècle av. J.-C.), et il a servi de modèle pour de nombreux édifices publics et complexes impériaux par la suite. Un Emplacement Spectaculaire Niché sur les pentes du mont Ginestro, le sanctuaire tire parti de la topographie naturelle pour créer une série de terrasses monumentales. Cette utilisation dramatique du terrain est une caractéristique majeure, transformant la montagne elle-même en un piédestal pour le culte de la déesse. L’ensemble est érigé sur plusieurs niveaux, reliés par des escaliers et des rampes, et soutenu par des murs en opus incertum et opus quasi reticulatum. La progression à travers le complexe était une expérience théâtrale et spirituelle planifiée. Denier Plaetoria – Marcus Plaetorius Cestianus La Déesse et l’Oracle Le complexe était dédié à Fortuna Primigenia (la « Première Enfantée » ou « Mère Originelle » de Juppiter et Juno), une déesse associée à la naissance, à la chance, et au destin. Préneste était célèbre pour son oracle, où les sortes Praenestinae (des tablettes en bois gravées de prophéties) étaient tirées par un enfant pour délivrer des messages divins. Selon la légende, cet oracle fut établi après qu’un certain Numerius Suffustius, prévenu par des songes, eut découvert les tablettes sacrées. Le cœur du sanctuaire était la grotte oraculaire, située près de la base du complexe. Le Couronnement Architectural : La Cavea Au sommet de la structure se trouve l’élément le plus reconnaissable : une large esplanade semi-circulaire (exèdre) dominée par un temple rond. Cette disposition rappelle un théâtre ou un cercle où la déesse trônait, offrant une vue imprenable sur la plaine environnante. Les Terrasses : Elles abritaient des portiques, des bassins, et des colonnades, créant des espaces d’attente et de procession. La Rampe Couverte : Une impressionnante série de rampes voûtées permettait aux pèlerins d’accéder aux niveaux supérieurs. Le Temple : Le petit temple circulaire final offrait un point focal pour le culte. Cette architecture, qui fusionne l’ingénierie romaine (arches, voûtes) avec le désir grec d’un espace monumental, a eu une influence profonde. On en retrouve des échos dans le Temple d’Hercule Victor à Tivoli, mais surtout dans le plan des grands forums et palais impériaux, comme le complexe d’Hadrien à la Villa Hadriana. Un Trésor Retrouvé : La Mosaïque du Nil Le complexe abritait également le célèbre Mosaique du Nil (ou Mosaïque nilotique de Palestrina), datant du début du Ier siècle av. J.-C. Cette mosaïque, probablement exposée dans l’une des exèdres, est une représentation détaillée et fascinante de la vie égyptienne, de la crue du Nil aux scènes de chasse et aux créatures exotiques. C’est une œuvre d’art précieuse qui témoigne des liens culturels et des influences hellénistiques sur l’Italie romaine. Préneste Aujourd’hui Aujourd’hui, une grande partie de la ville de Palestrina s’est construite directement sur les fondations du sanctuaire, incorporant ses structures massives. Le Musée Archéologique National de Palestrina est d’ailleurs logé dans l’ancien palais Barberini, qui occupe le niveau le plus haut de l’ancien temple, là où se trouvait autrefois l’esplanade semi-circulaire.
Junon Moneta : Gardienne des Finances et Mère de la Monnaie

Junon Moneta : Gardienne des Finances et Mère de la Monnaie De toutes les facettes de Junon, reine des dieux et épouse de Jupiter, celle de Junon Moneta est sans doute l’une des plus fascinantes et des plus pragmatiques. Plus qu’une simple figure religieuse, elle est la déesse tutélaire qui a donné son nom à l’institution la plus essentielle de notre économie moderne : la Monnaie. L’Origine Divine du Surnom Le nom Moneta dérive du verbe latin monere, qui signifie « avertir », « conseiller » ou « mettre en garde ». L’histoire la plus célèbre qui explique cette appellation est liée au Capitole à Rome. Selon la légende, lors de l’invasion gauloise de 390 av. J.-C., des oies sacrées (les « oies du Capitole »), gardées dans le temple de Junon sur la citadelle, auraient averti le défenseur romain Marcus Manlius Capitolinus de l’attaque nocturne imminente. En sauvant la citadelle, Junon fut créditée d’avoir averti (ou monuit) les Romains du danger. C’est en remerciement de cette intervention divine que lui fut donné le surnom de Junon Moneta. En l’honneur de cet événement, un temple fut érigé pour elle sur l’Arx, l’une des deux hauteurs du Capitole, et fut inauguré en 344 av. J.-C. Denier Plaetoria – L. Plaetorius Cestianus De la Gardienne des Avertissements à la Maîtresse des Finances C’est dans l’enceinte de ce temple, dédié à Junon Moneta, que s’est produit un changement historique majeur : L’Atelier Monétaire : Vers 269 av. J.-C., les Romains décidèrent d’établir leur principal atelier de frappe des monnaies non pas à côté, mais directement dans les dépendances du temple de Junon Moneta. L’Héritage Linguistique : Par un glissement sémantique des plus significatifs, les Romains se mirent à appeler le lieu de frappe la Moneta (par référence à la déesse gardienne du lieu). Progressivement, le terme en vint à désigner non plus seulement l’atelier, mais l’objet qui y était fabriqué : la monnaie. C’est ainsi que la fonction religieuse de Junon en tant que « Celle qui avertit » se mua en une fonction économique, celle de garantir l’intégrité et la valeur de la monnaie de la République, car la déesse veillait sur sa fabrication. Le mot Moneta est l’ancêtre direct de notre mot français « monnaie », de l’anglais money et de l’espagnol moneda. Junon Moneta aujourd’hui Junon Moneta est un parfait exemple de la façon dont les divinités romaines pouvaient incarner à la fois des concepts spirituels et des fonctions civiques et pratiques. Elle nous rappelle que l’institution de la monnaie, fondement de la puissance économique de Rome, était elle-même placée sous la protection d’une déesse, soulignant l’importance sacrée et la confiance accordée à ce système. Ainsi, chaque fois que nous utilisons une pièce ou un billet, nous rendons, sans le savoir, un hommage discret à la Reine des Dieux qui nous a « avertis » de l’importance de la valeur et de la prudence financière.
Le Genius Populi Romani : L’Âme Immortelle de la République et de l’Empire

Le Genius Populi Romani : L’Âme Immortelle de la République et de l’Empire L’esprit protecteur et la destinée de Rome Le concept de Genius dans la religion romaine est l’une des idées les plus fascinantes et les plus fondamentales pour comprendre la mentalité des Anciens. Généralement associé à l’esprit protecteur d’un individu (souvent identifié à sa force vitale, sa virilité et sa capacité à engendrer), ce concept a été étendu pour désigner l’âme collective et la destinée même de l’État romain : le Genius Populi Romani. Qu’est-ce que le Genius ? Dans son sens le plus strict, le Genius était une divinité tutélaire qui accompagnait l’homme de sa naissance à sa mort, une sorte d’alter ego divin. Pour les femmes, l’esprit correspondant était la Juno. Rendre un culte à son Genius revenait à célébrer sa propre vie et son identité. Lorsque ce concept est appliqué au niveau de la communauté (populus), il prend une dimension beaucoup plus vaste. Le Genius Populi Romani n’est pas simplement la somme des génies individuels ; il est la personnification de l’essence, du caractère, de la puissance et de la pérennité de l’État romain. Il incarne le destin promis à Rome. Denier Cornelia – Cnæus Cornelius Lentulus Marcellinus Un Symbole de l’Unité et de la Puissance Le culte du Genius Populi Romani était un élément essentiel de l’identité civique, en particulier sous la République, puis pendant l’Empire. Période Républicaine : Pendant les guerres civiles et les crises, l’invocation du Genius Populi Romani servait à rappeler aux citoyens leur devoir envers la patrie, leur patriotisme et la nécessité de préserver l’unité de l’État. Il était le témoin des serments et le garant de la loi. Période Impériale : Avec l’avènement de l’Empire, le culte du Genius de l’Empereur (Genius Augusti) est devenu prééminent. Cependant, le Genius Populi Romani n’a pas disparu. Il a souvent été associé au culte impérial pour légitimer le pouvoir du souverain, qui était présenté comme le garant et le protecteur de l’esprit éternel de Rome. L’Empereur était la manifestation vivante du destin que le Genius veillait à accomplir. Représentations Monétaires et Offrandes Le Genius Populi Romani était fréquemment représenté sur les monnaies romaines, un support de propagande essentiel. Ces représentations le montrent généralement sous les traits d’un homme jeune, drapé d’une toge et coiffé d’une couronne murale (symbolisant Rome comme ville fortifiée) ou d’un modius. Ses attributs les plus courants sont : La Corne d’Abondance (Cornucopia) : Symbole de la prospérité que Rome apporte au monde. La Patère : Une coupe utilisée pour verser les libations, un geste rituel essentiel pour honorer les dieux. Ces monnaies ne faisaient pas que circuler l’argent ; elles diffusaient l’idée que la force et la fortune de Rome n’étaient pas dues au hasard, mais à la protection de cet esprit immortel. Héritage Le Genius Populi Romani est plus qu’une divinité mineure oubliée. Il est la clé de voûte de la pensée romaine sur l’État et le Destin. Il explique la fides (loyauté), la virtus (courage) et la pietas (dévotion) qui ont permis à une petite cité-État d’édifier un empire couvrant le monde méditerranéen. En célébrant ce « Génie », les Romains célébraient non seulement leur passé glorieux, mais surtout leur avenir certain. Il reste, pour nous, le symbole intemporel de la capacité romaine à transcender l’individu pour le bien de l’éternelle Res Publica.
Le Temple de Jupiter Libertas : Aux Sources Sacrées de la Liberté Romaine

Le Temple de Jupiter Libertas : Aux Sources Sacrées de la Liberté Romaine Le concept de liberté, valeur fondamentale de la République romaine, n’était pas seulement une idée politique ou sociale ; il était incarné par une divinité, Libertas, souvent associée au maître des dieux, Jupiter. Parmi les sanctuaires dédiés à ces idéaux, le Temple de Jupiter Libertas tenait une place particulière. La Colline de l’Aventin : Foyer des Plébéiens et de la Liberté Bien que la déesse Libertas ait été célébrée dans plusieurs lieux, le Temple de Jupiter Libertas est principalement attesté sur la colline de l’Aventin à Rome. Cette colline revêtait une importance symbolique majeure : Le Foyer Plébéien : Historiquement, l’Aventin était le lieu de résidence privilégié de la plèbe, la classe populaire qui luttait pour ses droits et sa reconnaissance face au patriciat. Les Sanctuaires Populaires : Il accueillait des cultes importants pour les classes modestes, notamment le temple dédié à la triade plébéienne (Cérès, Liber et Libera). L’association du culte de Jupiter Libertas à cette zone renforce l’idée d’une liberté non pas seulement institutionnelle, mais populaire et accessible à tous les citoyens. Le temple de Iuppiter Libertas y était localisé, peut-être près du temple de Junon Regina, et sa dédicace était célébrée aux Ides d’avril (le 13 avril). Denier Egnatia – Caius Egnatius Maxsumus L’Allégorie de Libertas et l’Influence de Jupiter Libertas, la déesse de la liberté, n’était pas dotée d’une mythologie narrative complexe comme les grands dieux. Elle était une divinité allégorique qui incarnait l’idéal républicain après l’expulsion des rois en 509 av. J.-C. : Libertas et l’Affranchissement : Son culte était fortement lié au rituel de l’affranchissement (manumissio). L’esclave libéré devenait un libertus et la déesse protégeait et symbolisait cette transition vers la citoyenneté. L’un de ses attributs était le bonnet phrygien (pileus), coiffe portée par les affranchis, devenu un emblème universel de la liberté. L’Union avec Jupiter : L’ajout de l’épithète Libertas au nom de Jupiter (qui signifie « Très Bon et Très Grand », Optimus Maximus) est significatif. Jupiter était le dieu de l’ordre cosmique, des serments et du droit. L’association de la Liberté à Jupiter lui conférait un ancrage à la fois suprême et légitime : la liberté n’était pas un désordre, mais un droit sacré garanti par le dieu souverain lui-même. Un Lieu de Mémoire et d’Archives Le culte de la Liberté était également lié à l’administration publique. Le célèbre Atrium Libertatis (Atrium de la Liberté), bien qu’il ne soit pas le temple lui-même mais un lieu connexe, était un édifice important situé sur l’Aventin ou ses environs. Il servait de : Dépôt d’Archives : Les lois, les archives sénatoriales, et les documents administratifs étaient conservés ici. Lieu d’Affranchissement : C’est là que se déroulaient les cérémonies d’affranchissement des esclaves. En conservant les lois et les symboles de l’affranchissement, cet espace (et par extension le Temple de Jupiter Libertas) symbolisait que l’ordre républicain et la liberté civique étaient intrinsèquement liés et devaient être préservés. Conclusion Le Temple de Jupiter Libertas, sur l’Aventin, n’est pas aussi célèbre que le Temple de Jupiter Optimus Maximus sur le Capitole, mais son importance est profonde. Il témoigne de la manière dont les Romains ont sacralisé leur idéal le plus cher : la Libertas. Ce culte honorait non seulement une déesse, mais aussi la souveraineté du droit et la capacité du peuple à s’affranchir, des esclaves aux citoyens luttant pour leurs pleins droits politiques.
Le Lituus : Symbole du Pouvoir Augural dans la Rome Antique

Le Capis : Rites, Sacrifice et Piété dans la Rome Antique – Dupliquer – [#191980] Le lituus n’est pas un simple objet, c’est un puissant emblème du pouvoir et de la relation complexe qu’entretenaient les Romains avec le divin. Indissociable de la fonction d’augure, ce bâton courbe jouait un rôle essentiel dans la prise de décision politique et militaire de la République puis de l’Empire. Qu’est-ce que le Lituus ? Le lituus est un bâton augural, caractérisé par sa forme singulière : long et droit, il se termine par une volute ou une crosse courbe et tronquée, sans former de cercle complet. Matériau : Il était traditionnellement fabriqué en bois (souvent du noyer) et, dans les représentations, il est parfois orné ou de couleur bronze. Fonction : Il était l’outil principal des augures (prêtres chargés d’interpréter les signes divins, les omina), symbolisant leur autorité sacrée. Il n’était utilisé que dans le cadre des rituels de prise d’auspices (auspicia). Denier Caecilia – Quintus Cæcilius Metellus Pius Le Rôle Crucial de l’Augure L’augure, portant le lituus, avait pour mission d’interroger les dieux avant toute action publique majeure : élections de magistrats, promulgation de lois, déclarations de guerre, ou campagnes militaires. L’usage le plus emblématique du lituus était la délimitation du templum. Le Rituel : L’augure, orienté vers le sud, traçait mentalement (ou dans le ciel, l’air) une zone sacrée rectangulaire appelée templum à l’aide de son lituus. Cette zone servait de cadre à l’observation des auspices. L’Observation : Les signes observés à l’intérieur de ce templum (principalement le vol des oiseaux, leur chant, ou l’examen des entrailles d’animaux) étaient considérés comme la volonté des dieux. L’Interprétation : L’augure déterminait si les dieux étaient propices (auspicia bona) ou contraires (auspicia mala), ce qui décidait de l’issue de l’entreprise. Le Lituus et la Légende de Romulus L’importance du lituus est ancrée dans les mythes fondateurs de Rome. La tradition rapporte que Romulus, le fondateur et premier roi de Rome, était lui-même un augure accompli. La Fondation de Rome : Avant de fonder la ville, Romulus et Rémus consultèrent les auspices pour déterminer le lieu. Romulus aurait utilisé son lituus pour délimiter le templum où il vit douze vautours, signe favorable qui lui donna l’avantage sur son frère. Un Objet Miraculeux : Une autre légende raconte que le lituus de Romulus, après sa mort, fut précieusement conservé dans la Curie des Saliens et qu’il disparut miraculeusement après un incendie, avant de réapparaître intact sous les cendres, soulignant son caractère sacré et indestructible. Du Symbole Augural à l’Emblème Impérial Avec la fin de la République, le rôle du collège des augures fut progressivement intégré à la personne de l’Empereur. Le lituus devint alors un symbole de la dignité pontificale et impériale. On le retrouve fréquemment sur les monnaies, associé à la tête de l’Empereur (qui détenait le titre de Pontifex Maximus), ou sur des autels et sarcophages, marquant la piété et l’autorité sacrée du défunt. Conclusion Le lituus est bien plus qu’un simple crochet ; c’est la matérialisation du lien entre les Romains et leurs divinités. Il symbolise le pouvoir de la classe sacerdotale, l’acte fondateur de la Cité et, finalement, l’autorité suprême de l’Empereur. Cet objet est un témoignage puissant de la manière dont la religion et la politique étaient inextricablement liées dans le monde romain.
Le Capis : Rites, Sacrifice et Piété dans la Rome Antique

Le Capis : Rites, Sacrifice et Piété dans la Rome Antique Le culte et la religion romaine étaient structurés par des rituels précis où chaque geste, chaque offrande, et chaque ustensile avait une signification profonde. Au cœur de ces cérémonies, les instruments sacerdotaux jouaient un rôle essentiel, et parmi eux, le Capis se distingue comme un témoin humble mais crucial de la piété romaine. Qu’est-ce que le Capis ? Le capis est un type de vase à sacrifice utilisé dans la religion romaine antique. On le confond souvent avec la patera (une coupe large et peu profonde utilisée pour les libations), mais le capis se distingue par sa forme : c’est un récipient de petite taille, souvent doté d’une anse unique (monanse) ou parfois sans anse. Contrairement aux vases de luxe destinés à l’usage domestique, le capis était spécifiquement associé aux fonctions religieuses et à l’usage par les prêtres (les pontifices ou les flamines). Aureus Sylla – Lucius Cornelius Sulla Une Fonction Rituelle Précise La fonction première du capis était de contenir les liquides destinés aux libations ou de prélever une petite quantité de substance à offrir aux dieux. Les libations, qui consistaient à verser un liquide (vin, lait, huile, ou eau) sur un autel, dans le feu, ou sur le sol, étaient un acte fondamental de communication et de respect envers les divinités. Le capis permettait d’accomplir ce geste avec la précision et la solennité requises par le ius divinum (le droit divin). Les prêtres s’en servaient, par exemple : Pour la consécration d’un nouveau temple. Lors des fêtes publiques (les feriae). Avant un sacrifice sanglant, pour purifier l’autel ou l’offrande. Le Capis et la Représentation du Sacerdoce L’importance du capis dans la vie religieuse romaine est attestée par sa présence dans l’iconographie officielle. Il fait partie, avec d’autres objets comme l’encensoir (acerra), le bâton augural (lituus) et la patera, des insignes du sacerdoce. Sur les reliefs, les pièces de monnaie et les monuments publics, l’apparition du capis symbolisait la pietas (la piété, le respect des dieux et des devoirs) et la fonction de Grand Pontife (Pontifex Maximus), titre souvent porté par les empereurs eux-mêmes. Le représenter aux côtés de l’empereur renforçait l’idée que le dirigeant était à la fois le chef de l’État et le garant de l’harmonie avec le monde divin. Les Matériaux du Capis Si les exemplaires les plus précieux, destinés aux grands temples ou aux prêtres de haut rang, pouvaient être fabriqués en bronze orné ou en métaux précieux, la majorité des capis utilisés dans les sanctuaires domestiques (lararia) ou par les citoyens ordinaires étaient probablement en terre cuite (céramique). En fin de compte, le capis est bien plus qu’un simple vase : il est un symbole matériel de la spiritualité romaine, un lien tangible entre l’homme et ses dieux, incarnant la rigueur et la dévotion qui caractérisaient la religion de l’Urbs.
Le Tensa : Char des Dieux et Symbole Numismatique de la Rome Républicaine

Le Tensa : Char des Dieux et Symbole Numismatique de la Rome Républicaine En tant que numismates passionnés par la République Romaine, nous savons que chaque pièce de monnaie est une fenêtre sur l’histoire, la religion et la politique de cette période fascinante. L’un des types de revers les plus évocateurs et moins souvent expliqués est celui du char triomphal ou honorifique, connu sous le nom de Tensa. Loin d’être un simple véhicule, le tensa était un symbole puissant de la présence divine lors des grandes solennités romaines. Qu’est-ce que le Tensa ? Dans la Rome antique, le Tensa (du latin tendere, « étendre », désignant peut-être le drap tendu le protégeant) était un char sacré utilisé pour transporter les statues et les insignes des dieux majeurs (Jupiter, Junon, Minerve) depuis le Capitole jusqu’au Circus Maximus à l’occasion des Ludi Romani (Jeux Romains) ou d’autres fêtes solennelles. Ce char n’était pas un véhicule militaire ou de course, mais une voiture d’apparat, richement ornée et souvent tirée par quatre chevaux (quadriga), réservée exclusivement aux divinités. Sa présence lors de la Pompa Circensis (le cortège inaugural des Jeux) symbolisait le rôle actif et la bénédiction des dieux sur la ville. Denier Rubria – Lucius Rubrius Dossenus Le Tensa sur le Monnayage Républicain L’apparition du tensa sur les deniers et autres monnaies n’est pas fortuite. Elle est généralement liée au magistrat monétaire qui frappe la pièce et à l’une de ses fonctions officielles, ou à une allusion familiale. L. Rubrius Dossenus et les Jeux Circulaires L’exemple le plus notable est celui des monnaies frappées par le monétaire Lucius Rubrius Dossenus, datées autour de 87 av. J.-C. (selon Crawford, RRC 348). Avers : Têtes conjointes (ou des trois divinités du Capitole : Jupiter, Junon et Minerve/Pallas). Revers : On y voit très clairement un char triomphal, le Tensa, souvent surmonté d’une Victoire. Selon certains érudits, comme Cavedoni, ce type monétaire aurait été choisi parce qu’une loi importante pour l’organisation des Jeux Circulaires, la Lex Rubria-Acilia, aurait été proposée ou promulguée par un ancêtre de ce monétaire. En représentant le char triomphal, le monétaire ne fait pas seulement référence à la splendeur des Jeux, mais il honore l’action de sa propre gens (famille) dans l’administration des cultes et des fêtes publiques. Note Numismatique : Il est intéressant de noter que le char du revers de ces pièces de L. Rubrius Dossenus ressemble au char qu’on retrouve bien plus tard sur certains deniers d’Auguste (par exemple, la référence Julia, 119), démontrant une continuité iconographique. Conclusion Le Tensa sur les monnaies de la République Romaine est plus qu’un simple motif : il est l’incarnation d’un rite sacré, rappelant le lien essentiel entre l’État romain, ses dieux et la splendeur de ses fêtes civiques. Pour le collectionneur, ce type offre un aperçu précieux de la manière dont les magistrats monétaires utilisaient l’iconographie religieuse pour magnifier leur héritage familial.
1129HE – Semuncia Herennia – Marcus Herennius

1145TH – Semuncia Thoria – Lucius Thorius Balbus – Dupliquer – [#142595] Avers : Anépigraphe Buste de Diane, à droite, avec arc et carquois sur l’épaule. Revers : ROMA Corne d’abondance. SITNAM 2.46g INDICE DE RARETE : 10+ 1 10+ ATELIER : Rome Datation : 108-107 avant J.C. Matière : Alliage cuivreux Gens : Herennia Référence : RRC 308/5 Le Monétaire : M. Herennius Nom Complet: Marcus Herennius. Fonction: Triumvir Monétaire (tresviri monetales) à Rome. Date d’émission: Circa 108-107 av. J.-C. Postérité: Il est très probable que ce monétaire soit le même Marcus Herennius qui deviendra Consul de la République romaine en 93 av. J.-C. Extrait de Description historique et chronologique des monnaies de la République romaine d’Ernest Babelon Cette famille était, nous apprend Tite-Live originaire du Samnium ; elle s’établit en Campanie, où nous voyons un Herennius sénateur de Nola et un M. Herennius décurion de Pompei en 691 (63av. J.-C.). Une branche de cette tribu paraît même s’être expatriée pour se livrer au commerce, car on cite Herennius Siculus, qui, établi à Leptis, faisait le commerce entre l’Afrique et la Sicile et transrépublicain et suivit M. Brutus en Asie. On découvrit alors un comportait principalement le fameux silphium de la Cyrénaïque. Ce n’est que dans le dernier siècle de la république qu’on rencontre des Herennii à Rome. Ils portent les surnoms de Balbus, Bassus, Cerrinius, Pontius et Siculus. L’impératrice Etruscilla, femme de Trajan Dèce, et son fils Herennius Etruscus étaient issus de cette race. Mommsen qui a spécialement étudié l’histoire de cette tribu mentionne, sous la république, les personnages suivants : 1° C. Herennius qui paraît avoir été triumvir colonice deductoe en 536 (218 av. J.-C.); 2° Herennius Siculus qui fut emprisonné en 633 (121 av. J.-C.) comme ami de C. Gracchus, et qui, en témoignage de son amitié, se donna volontairement la mort; c’est sans doute le même personnage que celui dont nous avons parlé plus haut : il était aruspice; 3° C. Herennius, patron de la famille Maria, et qui, en cette qualité, refusa de porter témoignage contre C. Mariusen 639 (115 av. J.-C.) ; 40 M. Herennius Nepos, consul en 661, probablement l’aïeul de Herennius M. f. Picens, consul suffectus en 720 (34 av. J.-C.).Sur les médailles, on trouve le nom d’un M. Herennius qui doit être le fils du consul de l’an 661 (93 av. J.-C.). Pline mentionne le consulat de ce personnage comme remarquable par la quantité considérable de silphium qui fut alors apportée à Rome. Ce fils fut lui-même père de Herennius Picens, car ce dernier était fils d’un Marcus. Cavedoni regardait les pièces ci-dessous décrites comme frappées par M. Herennius Nepos vers l’an 646 (108 av. J.-C.). Nous les plaçons vers l’an 655 (99 av. J.-C.).Le type du denier de M. Herennius fait allusion au dévouement des deux frères Amphinomus et Anapias de Catane, qui, lors d’une éruption de l’Etna, emportèrent leurs vieux parents sur leurs épaules, à l’exemple d’Enée qui sauva son père Anchise. Ce fait de piété filiale est raconté notamment par Valère Maxime et par Pausanias. Les deux frères sont représentés, soit isolément, soit ensemble, sur les monnaies de Catane, leur ville natale, où les ancêtres de la gens Herennia étaient établis pour faire le commerce avec l’Afrique. Borghesi pense même que Herennius Siculus, l’aruspice et l’ami de C. Gracchus était originaire de Catane c’était probablement le père ou le grand-père de notre monétaire. Le même type se trouve sur les monnaies de Sextus Pompée qui ont été frappées à Catane. La tête de la Piété, au droit, est une allusion à la piété filiale d’Amphinomus et d’Anapias appelés les Pieux, et le lieu de leur sépulture portait le nom de campus piorum. Mommsen pense, en outre, que ce type de la Piété fait allusion à la fidélité de Herennius Siculus à l’égard de C. Gracchus, fidélité qu’il scella de son sang.
Apollon Vejovis : Le Dieu aux Deux Visages de la Rome Antique

Apollon Vejovis : Le Dieu aux Deux Visages de la Rome Antique Le nom d’Apollon évoque instantanément l’éclat de Delphes, la lyre harmonieuse et le Soleil. Pourtant, la mythologie romaine nous offre un portrait bien plus nuancé à travers la figure d’Apollon Vejovis (ou Vediovis). Moins connu que son homologue grec ou l’Apollon Medicus (Médecin) de Rome, Vejovis est une divinité complexe, aux racines antiques et aux attributs énigmatiques. Qui était ce dieu insaisissable ? Pourquoi est-il souvent dépeint comme l’inverse de Jupiter ? Plongeons dans l’histoire de ce dieu qui mêle la lumière d’Apollon à l’ombre d’une force primitive. Les Racines Obscures de Vejovis Avant d’être associé à Apollon, Vejovis (littéralement l’« anti-Jove » ou « petit Jove ») était une divinité romaine d’origine sabine ou étrusque (sous le nom de Veive). Une Nature Ambiguë : Les sources antiques, comme Aulu-Gelle, peignent Vejovis comme une force négative ou l’inverse de Jupiter, un dieu que l’on vénérait pour apaiser sa colère plutôt que pour solliciter son aide. Les Attributs de la Colère : Il est souvent représenté sous les traits d’un jeune homme tenant un faisceau de flèches destinées à nuire, ce qui rappelle le rôle d’Apollon, qui, malgré son titre de guérisseur, pouvait aussi propager la peste avec ses traits. Le Sacrifice Rituel : Pour l’apaiser, on lui sacrifiait rituellement une chèvre, animal souvent représenté à ses côtés. Ce sacrifice était parfois décrit comme fait « à la place d’un être humain » (ritu humano), soulignant la dimension chthonienne et potentiellement dangereuse du dieu. Denier Caesia – Lucius Cæsius L’Assimilation à Apollon C’est sous l’influence grecque que l’assimilation s’opère. En raison de leur jeunesse, de l’arc et des flèches comme attribut commun, et de leur statut de dieu guérisseur (Apollon Medicus), Vejovis est progressivement identifié à Apollon. Le Jeune Jupiter : Le poète Ovide le décrit comme un « jeune Jupiter sans foudre ». Cette jeunesse, combinée à l’arc, justifiait l’assimilation à Apollon. Maître des Forces Cachées : En tant qu’Apollon Vejovis, il représente la face sombre ou primitive du dieu solaire. Certains auteurs le considèrent comme le maître des volcans, des marais et des tremblements de terre, des forces profondes et cachées, le comparant même à Pluton, le dieu des Enfers. Protecteur de l’Asile : Son temple le plus célèbre à Rome se trouvait sur le Capitole, dans l’enceinte de l’Asylum, le bois sacré qui servait de refuge entre les deux sommets de la colline. Témoignages Numismatiques Les monnaies romaines sont l’une de nos meilleures sources pour visualiser Apollon Vejovis, notamment à travers les deniers républicains : Représentation sur les Monnaies Interprétation Buste lauré d’Apollon Vejovis Jeune dieu, souvent avec une aura de lumière. Foudre (ou fulmen) Attribut de Jupiter, soulignant son lien, mais aussi son opposition, à la puissance céleste suprême. Génie Ailé sur la Chèvre Amalthée Une autre monnaie montre le Génie du dieu enfant monté sur la chèvre Amalthée. Ce symbole lie le culte de Vejovis à la naissance de Jupiter (nourri par la chèvre).. Conclusion : Un Dieu d’Équilibre Subtil Apollon Vejovis incarne parfaitement la manière dont les Romains adaptaient et complexifiaient les divinités. Il n’est pas seulement le dieu de la lumière ; il est la lumière face à ses propres forces obscures, le guérisseur capable de propager la maladie, le jeune archer qui contrôle à la fois la vie et les forces souterraines. Étudier Apollon Vejovis, c’est reconnaître la profondeur du panthéon romain et son effort pour donner une place aux divinités primitives qui rappellent que la puissance divine n’est jamais uniquement bienveillante, mais nécessite respect et apaisement.