Pax

Pax Origines et généalogie : Pax est une divinité abstraite, comme beaucoup de personnifications romaines (Concordia, Victoria, Libertas). Selon la tradition, elle est fille de Jupiter (dieu souverain) et de Iustitia (Justice), soulignant l’idée que la paix véritable repose sur l’ordre et la justice. Cette généalogie symbolique renforce son rôle dans l’idéologie romaine. Parallèles avec Eiréné : Dans la mythologie grecque, Eiréné, l’une des Heures (Horae), incarne la paix comme un état d’équilibre naturel et social. Contrairement à Pax, Eiréné est plus associée à la prospérité agricole et moins à la victoire militaire. Pax, en revanche, est profondément ancrée dans le contexte impérial romain, où la paix est un produit de la domination. Autres divinités similaires : Pax partage des traits avec Concordia (harmonie sociale) et Salus (santé, salut public). Ces divinités reflètent les valeurs romaines d’unité et de stabilité, mais Pax se distingue par son lien direct avec la fin des conflits. Rôle politique et historique : Pax Romana : Sous Auguste (27 av. J.-C. – 14 ap. J.-C.), Pax devient un symbole central de la propagande impériale. La Pax Romana désigne une période de relative stabilité dans l’Empire romain, marquée par l’absence de guerres civiles majeures et l’expansion contrôlée. Cependant, cette « paix » est souvent imposée par la force, notamment via la soumission des provinces conquises. Ara Pacis Augustae : Cet autel, construit entre 13 et 9 av. J.-C., est une œuvre majeure de l’art augustéen. Il célèbre le retour d’Auguste d’Hispanie et de Gaule, présenté comme un triomphe pacifique. Les reliefs montrent Pax entourée de figures allégoriques (Tellus, la Terre nourricière, ou Roma), des scènes de fertilité, et la famille impériale, liant la paix à la dynastie julio-claudienne. L’autel est autant un monument religieux qu’un outil de propagande. Templum Pacis : Construit par Vespasien après la guerre civile de 69 ap. J.-C. et la prise de Jérusalem, ce temple abritait des trésors (comme ceux du Temple de Jérusalem) et symbolisait la restauration de l’ordre. Il incluait des jardins et une bibliothèque, associant la paix à la culture et à la prospérité. Monnaies et propagande : Dès -44 av. J.-C., Pax apparaît sur des pièces, souvent avec des attributs comme l’olivier ou la corne d’abondance. Sous Néron, Vespasien, et Trajan, elle est invoquée pour célébrer la fin des troubles ou des campagnes militaires. Par exemple, les pièces de Vespasien montrent Pax tenant une branche d’olivier avec l’inscription PAX AUGUSTA. Culte et pratiques religieuses : Fêtes : Les principales célébrations de Pax ont lieu les 3 et 30 janvier, dates associées à des offrandes pour la paix de l’Empire, et le 4 juillet, lié à la consécration de l’Ara Pacis. Ces fêtes impliquaient des sacrifices (animaux, encens) et des processions. Prêtres et rituels : Bien que Pax n’ait pas de collège sacerdotal spécifique comme les Vestales, son culte était supervisé par les pontifes ou par l’empereur lui-même, qui agissait comme pontifex maximus. Les rituels mettaient l’accent sur la gratitude pour la paix et la prière pour sa continuité. Diffusion géographique : Le culte de Pax était surtout centré à Rome, mais des autels et statues dédiés à Pax existaient dans les provinces, notamment en Gaule, en Hispanie et en Afrique, où la paix romaine était célébrée comme un bienfait impérial. Iconographie et symbolisme : Représentations : Pax est souvent une jeune femme drapée, tenant une branche d’olivier (symbole de paix), une corne d’abondance (abondance), ou un caducée (prospérité et commerce). Parfois, elle est assise, évoquant la stabilité, ou entourée d’enfants, symbolisant la fécondité. Art augustéen : Les reliefs de l’Ara Pacis montrent une figure féminine (souvent identifiée comme Pax ou Tellus) dans un cadre bucolique, avec des plantes, des animaux et des vents fertilisants. Cette imagerie lie la paix à la nature et à la fertilité. Évolution : Sous les Flaviens et les Antonins, Pax devient plus martiale, parfois représentée avec des trophées d’armes, reflétant la paix par la victoire militaire. Statue de Pax dans le jardin du Palais de Pavlovsk, St Petersbourg Perspective critique : Instrumentalisation politique : La glorification de Pax sous Auguste et ses successeurs masque une réalité plus complexe. La Pax Romana impliquait souvent l’oppression des peuples conquis et la répression des révoltes (par exemple, en Germanie ou en Judée). Pax était donc moins une divinité universelle qu’un outil idéologique pour légitimer le pouvoir impérial. Contraste avec Eiréné : Là où Eiréné incarne une paix idéale et cosmique dans la pensée grecque (notamment chez Hésiode ou Pindare), Pax est pragmatique, liée à l’ordre romain. Cette différence reflète les priorités romaines : la paix comme contrôle plutôt que comme harmonie. Héritage ambivalent : Si Pax a inspiré des notions modernes de paix, son association avec l’impérialisme romain rappelle que la « paix » peut être un euphémisme pour la domination. Les critiques modernes, notamment dans les études postcoloniales, soulignent cet aspect. Héritage culturel : Christianisme : L’idée de Pax influence le concept de Pax Christi (paix du Christ), où la paix spirituelle remplace la paix impériale. Les premiers chrétiens, persécutés sous l’Empire, réinterprètent la paix comme une valeur divine indépendante du pouvoir terrestre. Art et littérature : Pax apparaît dans la poésie romaine, comme chez Virgile (Énéide), où la paix augustéenne est célébrée comme l’aboutissement de l’histoire romaine. Dans l’art, son iconographie influence les représentations médiévales et renaissantes de la paix. Diplomatie moderne : Le terme pax (comme dans Pax Americana ou Pax Britannica) tire son origine de la Pax Romana, bien que ces concepts s’éloignent de la divinité pour désigner une hégémonie politique. Anecdotes et faits moins connus : Pax et les provinces : Dans certaines régions, comme l’Afrique proconsulaire, Pax était vénérée avec des divinités locales, créant un syncrétisme religieux où#-tified as Pax Augusta*. Pax et la guerre : Ironiquement, les empereurs invoquaient Pax après des victoires brutales, comme Vespasien après la destruction de Jérusalem en 70 ap. J.-C., montrant le paradoxe d’une paix imposée par la violence. Survivance : Des statues de Pax ont été retrouvées dans des sites archéologiques comme Ostie ou Pompéi, témoignant
Vénus

Vénus Vénus, dans la mythologie romaine, est la déesse de l’amour, de la beauté, de la séduction, de la fertilité et parfois de la victoire. Assimilée dès le IIe siècle av. J.-C. à la déesse grecque Aphrodite, elle partage ses mythes et attributs, tout en conservant une identité romaine distincte. À l’origine, Vénus était une divinité italique liée à la végétation et aux jardins, mais son association avec Aphrodite l’a transformée en une figure centrale de l’amour et de la sexualité. Origines et naissance Selon les récits, Vénus/Aphrodite a deux origines principales : Née de l’écume marine : Dans la Théogonie d’Hésiode, elle naît de l’écume (en grec aphros) formée lorsque Cronos castre son père Ouranos et jette ses organes génitaux dans la mer. Elle émerge sur un coquillage, souvent représentée arrivant à Chypre ou Cythère. Ce mythe inspire des œuvres comme La Naissance de Vénus de Botticelli (vers 1485). Fille de Jupiter et Dioné : Dans une version homérique, Vénus est la fille de Jupiter (Zeus) et de la titanide Dioné, ce qui la rend plus intégrée au panthéon olympien. Son nom pourrait dériver du latin vincire (« lier »), symbolisant l’union des forces vitales, ou de uenus, lié à la séduction et à la bienveillance divine. Rôles et attributs Vénus incarne plusieurs aspects : Amour et beauté : Elle représente l’amour romantique, la séduction et la beauté féminine, souvent dépeinte nue ou semi-nue dans l’art. Ses attributs incluent la rose, le myrte, la pomme, la colombe, le cygne, le coquillage, le miroir et la ceinture magique qui suscite le désir. Fertilité et prospérité : En tant que déesse agraire à l’origine, elle protège les jardins et la fécondité. Victoire : Sous le titre Venus Victrix (« victorieuse »), elle est associée à la victoire militaire, notamment par Pompée et Jules César. Mère d’Énée : Dans l’Énéide de Virgile, Vénus est la mère du héros troyen Énée, ancêtre mythique des Romains. Elle guide Énée après la chute de Troie pour fonder Rome, renforçant son rôle de protectrice nationale. Jules César et Auguste revendiquent une ascendance divine via Énée, la vénérant comme Venus Genitrix (mère du peuple romain). Statue d’Aphrodite, dite Vénus d’Arles. Marbre de l’Hymette, œuvre romaine de l’époque de l’empereur Auguste (fin du Ier siècle av. J.-C.), peut-être une copie de l´Aphrodite de Thespies réalisée par Praxitèle. La pomme et le miroir sont des ajouts réalisés au XVIIe siècle. Découverte en 1651 dans le théâtre antique d’Arles, France. Amours et descendance Vénus est célèbre pour ses nombreuses liaisons, divines et mortelles : Vulcain (Héphaïstos) : Mariée de force au dieu forgeron, elle le trompe souvent. Leur mariage est sans amour et sans enfants. Mars (Arès) : Son amant le plus connu, avec qui elle a Éros (Cupidon), Déimos (Terreur), Phobos (Peur) et Harmonie. Une légende raconte que Vulcain les piège dans un filet magique, les exposant aux moqueries des dieux. Anchise : Amoureuse du mortel troyen Anchise, elle donne naissance à Énée. Elle se déguise en princesse phrygienne pour le séduire, révélant sa divinité après la naissance d’Énée. Adonis : Éprise du beau mortel Adonis, elle le partage avec Proserpine (Perséphone). Adonis est tué par un sanglier, peut-être envoyé par Mars jaloux. Autres : Avec Hermès, elle a Hermaphrodite ; avec Dionysos, Priape ; avec Poséidon, Rhodos. Cultes et fêtes Vénus était vénérée sous plusieurs épithètes reflétant ses multiples facettes : Venus Obsequens (« obéissante ») : Son plus ancien temple à Rome, construit en 293 av. J.-C., financé par des amendes de matrones accusées de luxure. Venus Erycina : Importée du mont Éryx en Sicile, elle est associée au plaisir et à la victoire. Son temple sur le Capitole (215 av. J.-C.) marque son rôle de protectrice contre les Carthaginois. Venus Verticordia (« qui tourne les cœurs ») : Protectrice de la chasteté féminine, célébrée lors des Veneralia le 1er avril. Venus Genitrix : Introduite par Jules César en 46 av. J.-C., elle est la déesse de la maternité et du foyer. Vinalia rustica (18 août) : Fête agraire liée à Vénus et Jupiter, célébrant la récolte. Son culte, initialement agraire, s’est politisé sous la République et l’Empire, notamment par Sylla, Pompée, César et Auguste, qui l’ont utilisée pour légitimer leur pouvoir. Représentations artistiques Dès la Renaissance, Vénus devient un sujet majeur dans l’art occidental, inspirée par les statues grecques comme l’Aphrodite de Cnide de Praxitèle. Parmi les œuvres célèbres : La Naissance de Vénus de Botticelli (1485) : Vénus émergeant des flots, symbolisant la beauté idéale. Vénus de Milo (vers 150-130 av. J.-C.) : Statue hellénistique, incarnant la grâce féminine. Vénus et Adonis de Titien et Rubens : Scènes romantiques et tragiques. Vénus accroupie : Motif sculptural répandu. Son image nue, socialement acceptée comme symbole de la déesse, permet aux artistes d’explorer l’érotisme et la beauté féminine. Denier César Influence et symbolisme Vénus transcende son rôle mythologique pour devenir un archétype de la féminité, de la sexualité et de la créativité. Son association avec la planète Vénus, l’« étoile du matin » et du soir, renforce son lien avec la navigation et la lumière céleste. Dans la culture romaine, elle est aussi liée à Rome elle-même, le palindrome ROMA/AMOR soulignant son rôle de mère spirituelle de la ville. En somme, Vénus est une figure complexe, mêlant amour, pouvoir et fertilité, dont l’héritage perdure dans l’art, la littérature et la pensée occidentale.
Jupiter

Jupiter Dans la mythologie romaine, Jupiter (Iuppiter) est le roi des dieux, équivalent de Zeus dans la mythologie grecque. Il règne sur le ciel, le tonnerre et la justice, brandissant un éclair comme symbole de son pouvoir. Protecteur de Rome, il occupait une place centrale dans la religion d’État, avec des temples majeurs comme celui de Jupiter Optimus Maximus sur le Capitole. Ses mythes mettent en avant son autorité sur les autres dieux, son rôle dans l’ordre cosmique et ses nombreuses aventures amoureuses, qui donnèrent naissance à des héros et des divinités comme Hercule. Rôle et attributs de Jupiter Jupiter est la divinité suprême du panthéon romain, incarnant l’autorité, la justice et l’ordre cosmique. Son nom, dérivé de Iovis pater (« Père Jove »), reflète son statut de père des dieux et des hommes. Il est associé à : Le ciel et les phénomènes atmosphériques : En tant que dieu du tonnerre et des éclairs, il contrôle les tempêtes et les signes célestes, souvent interprétés comme des messages divins par les Romains. La justice et les serments : Jupiter est le garant des serments et des lois, punissant les parjures. Son rôle de Jupiter Feretrius (lié aux traités) souligne son importance dans les accords politiques et militaires. La souveraineté : Il est le protecteur de l’État romain et de ses dirigeants, symbolisant la légitimité du pouvoir. Ses symboles incluent : L’éclair : Représentation de son pouvoir destructeur et divin. L’aigle : Son animal sacré, messager entre le ciel et la terre. Le chêne : Arbre associé à sa force et sa pérennité. Le sceptre et le trône : Signes de son autorité royale. Sculpture de Jupiter Tonans au Musée del Prado (Madrid) Statue de Jupiter, fin du Ier siècle après J.-C., en marbre. Les draperies, le ceptre, l’aigle et la victoire sont en plâtre peint et datent du XIXe siècle. Mythes principaux Les mythes de Jupiter, souvent adaptés des récits grecs de Zeus, mettent en scène son pouvoir, ses combats et ses relations complexes avec les mortels et les autres dieux. Voici quelques récits marquants : La chute de Saturne et la Titanomachie : Jupiter est le fils de Saturne (Cronos) et d’Ops (Rhéa). Saturne, craignant d’être renversé par ses enfants, les dévorait à la naissance. Ops cacha Jupiter, qui grandit en secret. Adulte, il força Saturne à régurgiter ses frères et sœurs (Junon, Neptune, Pluton, Cérès, Vesta) et mena une révolte contre lui. Avec ses alliés, Jupiter affronta les Titans lors de la Titanomachie, une guerre cosmique. Grâce à l’aide des Cyclopes, qui lui forgèrent des éclairs, et des Hécatonchires, il vainquit les Titans et les emprisonna dans le Tartare, devenant le maître de l’univers. Les amours de Jupiter : Jupiter est célèbre pour ses nombreuses liaisons, souvent sous des formes métamorphosées, qui donnèrent naissance à des héros et des divinités. Parmi les plus connues : Europe : Transformé en taureau blanc, Jupiter enleva la princesse phénicienne Europe et l’emmena en Crète, où elle donna naissance à Minos, Rhadamanthe et Sarpédon. Léda : Sous la forme d’un cygne, il séduisit Léda, qui enfanta Hélène, Clytemnestre, Castor et Pollux. Io : Transformée en génisse par Jupiter pour échapper à la jalousie de Junon, Io fut poursuivie par un taon envoyé par la déesse avant d’être restaurée. Ganymède : Jupiter, épris du jeune Troyen, l’enleva sous forme d’un aigle pour en faire l’échanson des dieux. Ces aventures provoquaient souvent la colère de Junon (Héra), épouse de Jupiter, qui se vengeait sur les amantes ou leurs enfants. Jupiter et les héros : Jupiter est le père de nombreux héros, comme Hercule (fils d’Alcmène) ou Persée (fils de Danaé, séduite sous forme d’une pluie d’or). Ces héros, souvent dotés de qualités extraordinaires, incarnaient l’idéal romain de vertu et de courage. Dans certains mythes, Jupiter intervient directement pour guider ou protéger les mortels, comme dans l’Énéide de Virgile, où il soutient Énée, fondateur mythique de Rome. Jupiter et Phaéton : Dans le mythe de Phaéton, fils du Soleil, Jupiter intervient pour sauver la Terre. Phaéton, incapable de contrôler le char solaire de son père, met le monde en péril. Jupiter le foudroie pour arrêter la catastrophe, illustrant son rôle de gardien de l’équilibre cosmique. Symboles et attributs L’éclair : Symbole de son pouvoir sur le ciel et de sa capacité à punir ou à inspirer la crainte. L’aigle : Oiseau majestueux représentant sa domination et sa vision omnisciente. Le chêne : Arbre sacré associé à sa force et à sa pérennité. Le sceptre et le trône : Symboles de son autorité royale sur les dieux et les hommes. La couronne de laurier : Souvent associée à la victoire et à son rôle de protecteur des triomphes romains. Culte et pratiques religieuses Le culte de Jupiter était au cœur de la religion romaine. Les flamines maiores, prêtres dédiés à Jupiter, veillaient à l’exécution correcte des rituels. Les festivals majeurs incluaient : Les Ludi Romani : Jeux et sacrifices organisés en septembre en son honneur, avec des courses de chars et des spectacles. Les Ludi Plebeii : Célébrations similaires en novembre, renforçant son lien avec le peuple. Les Vinalia : Fêtes liées au vin et à la fertilité, où Jupiter était invoqué pour protéger les récoltes. Les Romains consultaient la volonté de Jupiter à travers les augures, observant le vol des oiseaux ou les éclairs. Un éclair à droite était un signe favorable, tandis qu’un éclair à gauche était un mauvais présage. Les serments prêtés « par Jupiter » (per Iovem) étaient considérés comme sacrés, et leur violation attirait la colère divine. Jupiter et la politique romaine Jupiter était intimement lié à l’identité romaine. Les dirigeants, des rois aux empereurs, se présentaient comme ses protégés. Par exemple, Jules César et Auguste revendiquaient une connexion spéciale avec Jupiter pour asseoir leur légitimité. Sous l’Empire, Jupiter devint un symbole de l’unité romaine, et son culte fut exporté dans les provinces, où il était parfois assimilé à des divinités locales (comme Taranis chez les Celtes). Comparaison avec Zeus
Le Temple de Jupiter Capitolin : Le cœur sacré de Rome

Temple de Jupiter capitolin Au sommet du Capitole, la plus sacrée des sept collines de Rome, se dressait autrefois le plus prestigieux et le plus imposant des sanctuaires de la République, puis de l’Empire : le Temple de Jupiter Optimus Maximus Capitolinus, dédié à la puissante Triade Capitoline : Jupiter, Junon et Minerve. Plus qu’un simple lieu de culte, il fut le véritable cœur spirituel et politique de la puissance romaine. 🏛️ Un héritage royal et des dimensions colossales L’histoire du Temple de Jupiter est intrinsèquement liée aux débuts de Rome. Sa construction fut initiée au VIe siècle av. J.-C. par les derniers rois étrusques de Rome, Tarquin l’Ancien (Priscus) et Tarquin le Superbe. Achevé au début de la République, il fut solennellement inauguré le 13 septembre 509 av. J.-C., une date symbolique marquant l’avènement du nouveau régime. Ses dimensions étaient stupéfiantes pour l’époque archaïque. S’étendant sur environ 53 x 63 mètres, il fut le plus grand temple de style toscan (étrusque) jamais érigé. Il reposait sur un haut podium et présentait une façade imposante ornée de six colonnes disposées sur trois rangées. Denier Volteia – Marcus Volteius 🔱 La Triade Capitoline : Jupiter, Junon et Minerve Contrairement à de nombreux temples dédiés à une seule divinité, celui-ci abritait trois cellae (chambres de culte) juxtaposées, chacune pour un membre de la Triade : Jupiter Optimus Maximus (le Très Bon, le Très Grand) occupait la cella centrale, dominant l’ensemble en tant que principal protecteur de l’État romain. Sa statue colossale, peut-être chryséléphantine (d’or et d’ivoire) ou en terre cuite peinte à l’origine, était un spectacle de majesté divine. Junon (déesse protectrice des femmes et du mariage) et Minerve (déesse de la sagesse, de la guerre tactique et des arts) occupaient les cellae latérales. Sur le toit, des acrotères (statues décoratives) mettaient en scène les trois divinités, avec notamment un célèbre quadrige en terre cuite (char tiré par quatre chevaux) attribué à l’artiste étrusque Vulca de Veii. 🔥 Le Phénix de Rome : Les Reconstructions Le Temple de Jupiter Capitolin, en dépit de sa sacralité, fut la proie des flammes à plusieurs reprises, agissant comme un baromètre des troubles traversés par Rome : Incendie de 83 av. J.-C. : Le premier temple archaïque fut entièrement détruit, emportant avec lui des trésors inestimables, dont les précieux Livres Sibyllins. Reconstructions Majeures : Il fut reconstruit en pierre puis en marbre, notamment sous Sylla et plus tard, après de nouveaux incendies (en 69 et 80 ap. J.-C.), par les empereurs Vespasien et Domitien. La version de Domitien était un summum de luxe, avec des colonnes de marbre du Pentélique et un toit recouvert de tuiles en bronze doré. ⚔️ Centre du Triomphe et du Pouvoir Le rôle du temple dépassait largement le culte. Il était le lieu où se déroulaient les moments les plus solennels de la vie publique romaine : Le Triomphe : Le général vainqueur, à la tête de sa procession, montait au Capitole pour offrir le sacrifice final à Jupiter en signe de gratitude. Les Vœux des Magistrats : Les consuls nouvellement élus s’y rendaient pour accomplir des sacrifices et solliciter l’approbation divine avant de prendre leurs fonctions. Les Archives : Le temple abritait des documents officiels et des trésors de l’État. Aujourd’hui, si le temple a disparu, démantelé au fil des siècles et ses matériaux réutilisés, ses fondations massives en tuf restent visibles sous les Musées du Capitole, rappelant la grandeur et la pérennité de l’esprit romain.
Fulvie

Fulvie Fulvie (vers 83-40 av. J.-C.), épouse de Marc Antoine, est une figure marquante de la Rome antique, connue pour son influence politique et son rôle dans les luttes de pouvoir de la fin de la République romaine. Biographie et rôle : Origines : Issue de la gens plébéienne Fulvia, elle était la fille de Marcus Fulvius Bambalio et de Sempronia. Son ascendance lui conférait richesse et relations. Mariages : Avant Marc Antoine, Fulvie épousa deux hommes influents : Publius Clodius Pulcher (jusqu’à son assassinat en 52 av. J.-C.), un tribun populiste. Gaius Scribonius Curio (mort en 49 av. J.-C.), un partisan de César. Marc Antoine (vers 46 av. J.-C.), triumvir et allié de César, avec qui elle eut deux fils, Marcus Antonius Antyllus et Iullus Antonius. Influence politique : Fulvie n’était pas une simple épouse ; elle jouait un rôle actif dans la politique romaine. Elle mobilisait des soutiens, gérait des alliances et influençait les décisions de ses maris, notamment Marc Antoine. Son inimitié envers Cicéron était notoire, culminant dans la proscription et l’exécution de ce dernier en 43 av. J.-C. (on raconte qu’elle aurait profané son cadavre). Guerre de Pérouse (41-40 av. J.-C.) : Après la formation du Second Triumvirat (Antoine, Octave, Lépide), Fulvie, avec Lucius Antonius (frère de Marc Antoine), déclencha une rébellion contre Octave pour défendre les intérêts d’Antoine et des vétérans. Assiégée à Pérouse, elle fut vaincue. Cet événement affaiblit sa position. Mort : Fulvie s’exila à Sicyone (Grèce) après la défaite et y mourut en 40 av. J.-C., probablement de maladie. Sa mort facilita la réconciliation temporaire entre Antoine et Octave via le traité de Brundisium. Fulvie et la tête de Cicéron (Pavel Svedomski 1849-1904) Quinaire Fulvie – Marcus Antonius Importance : Fulvie est l’une des rares femmes romaines de son époque à avoir exercé une influence politique directe, défiant les normes de genre. Son ambition et son engagement dans les intrigues du Triumvirat en font une figure complexe, souvent décrite comme manipulatrice par les sources antiques (comme Plutarque), mais aussi comme une stratège loyale à ses proches.
Le Faisceau de Licteur : Symbole d’Autorité et d’Imperium Romain

Le Faisceau de Licteur : Symbole d’Autorité et d’Imperium Romain Le Faisceau de Licteur, ou Fasces en latin, est bien plus qu’un simple accessoire historique. Il s’agit de l’un des symboles les plus puissants et durables de l’autorité politique et de la juridiction de la Rome Antique. Emblème de la puissance légale conférée par le peuple, il a traversé les millénaires pour influencer la symbolique républicaine jusqu’à nos jours. Qu’est-ce que le Faisceau de Licteur ? Le Fasces est un assemblage simple mais significatif : un paquet de baguettes (traditionnellement en bois d’orme ou de bouleau) ligotées ensemble par des lanières de cuir, et contenant souvent une hache (securis) dont la lame dépasse du sommet. Ce faisceau était porté par les licteurs, des fonctionnaires civils chargés d’accomporter et de précéder les magistrats détenteurs de l’Imperium (le pouvoir de commandement militaire et civil), tels que les consuls, les préteurs et, à l’époque impériale, l’empereur lui-même. Denier Norbana – Caius Norbanus L’Allégorie de la Puissance Chaque élément du Fasces représente une facette de l’autorité romaine : Les Baguettes ( Virgae ) : Elles symbolisaient le pouvoir de châtiment corporel (la flagellation). Attachées ensemble, elles véhiculaient l’idée que si une seule baguette est facile à briser, le paquet entier est beaucoup plus résistant. C’est la force dans l’unité, une métaphore de la République elle-même. La Hache ( Securis ) : Placée au centre des baguettes, elle représentait l’Imperium au sens le plus fort : le pouvoir de mettre à mort (la peine capitale). La Signification selon le Contexte La présence ou l’absence de la hache révélait immédiatement la nature de l’autorité du magistrat et son rayon d’action : Contexte Hache Visible ? Signification de l’Imperium À Rome (Ville) NON (retirée) Le droit de faire appel (Provocatio ad Populum) protégeait les citoyens romains des exécutions arbitraires. La hache était retirée par respect pour le pouvoir du Peuple et le Sénat. Hors de Rome (Provinces) OUI (incluse) Le magistrat exerçait son Imperium absolu (y compris la peine capitale) pour maintenir l’ordre et la discipline, notamment sur les non-citoyens ou les troupes. Magistrat Triumphant OUI Lors d’un Triomphe, la hache était visible, rappelant le pouvoir militaire du général victorieux. Un Héritage Durable Bien que l’Empire romain ait disparu, le symbolisme du Faisceau de Licteur a survécu : République Française : Le Fasces est un élément central de l’emblème national français, incarnant l’autorité de l’État et l’unité de la nation. États-Unis : Le symbole est présent dans l’architecture et l’iconographie politique américaine, comme sur les côtés du fauteuil de la Chambre des Représentants. Italie : Le terme « faisceau » (fascio) a donné son nom au mouvement fasciste du XXe siècle, qui a délibérément récupéré et perverti ce puissant symbole d’autorité romaine. Le Faisceau de Licteur reste ainsi une fenêtre sur la pensée politique romaine, rappelant que l’autorité n’est légitime que lorsqu’elle est conférée, respectée, et que même le plus grand pouvoir est intrinsèquement lié à la justice et à la loi.
Fortuna

Fortuna Fortuna, déesse romaine du hasard, de la chance et de la destinée, est une figure complexe et centrale dans la religion et la culture romaines. Voici une exploration plus approfondie : Origines et identité Fortuna tire ses origines de croyances italiques anciennes, mais elle s’inspire fortement de la Tyché grecque, déesse du hasard et de la fortune. Son nom dérive du latin fors (chance) ou ferre (porter), suggérant qu’elle « apporte » le destin. À Rome, elle était vénérée sous de multiples épithètes, reflétant ses divers aspects : Fortuna Primigenia : la « première-née », associée à la fertilité et à la fondation. Fortuna Publica : protectrice de la chance de l’État romain. Fortuna Virilis : garante de la chance des hommes ou de la virilité. Fortuna Redux : celle qui ramène sain et sauf, invoquée pour les voyageurs ou les empereurs de retour de campagnes. Son rôle ambigu oscille entre une divinité bienveillante dispensant la prospérité et une force capricieuse, imprévisible, capable de renverser les puissants ou d’élever les humbles. Symbolisme Fortuna est souvent représentée avec des attributs spécifiques : La roue de la fortune (Rota Fortunae) : Symbole de l’instabilité du destin, elle tourne selon son caprice, élevant ou précipitant les mortels. Ce motif a perduré dans la culture médiévale et au-delà. La corne d’abondance : Représente la richesse et les bénédictions qu’elle peut accorder. Le gouvernail ou le globe : Signifie son contrôle sur le cours des événements. Les yeux bandés (parfois) : Dans certaines représentations tardives, elle est aveugle, soulignant l’impartialité ou l’arbitraire de la chance. Ces images reflètent la dualité de Fortuna : elle est à la fois généreuse et imprévisible, une force que même les dieux ne contrôlent pas totalement. Culte et pratiques Le culte de Fortuna était répandu dans tout l’Empire romain, avec des sanctuaires majeurs : Préneste (aujourd’hui Palestrina) : Son temple de Fortuna Primigenia était un centre oraculaire important où l’on consultait des sorts (sortes) pour prédire l’avenir. Rome : Le temple de Fortuna Redux, dédié à Auguste, célébrait son retour sauf de campagnes militaires. Le temple de Fortuna Publica sur le Quirinal protégeait la destinée de l’État. Les Romains l’invoquaient dans des contextes variés : les marchands pour la prospérité, les généraux pour la victoire, les citoyens ordinaires pour la chance quotidienne. Les fêtes en son honneur, comme celle du 24 juin, incluaient des offrandes, des prières et parfois des jeux. Les oracles de Fortuna, notamment à Préneste, utilisaient des tablettes divinatoires pour guider les décisions. Tomis Fortuna, musée de Vatican Denier Plaetoria – Marcus Plaetorius Cestianus Fortuna dans la société romaine Fortuna incarnait une vision romaine du monde où le destin (fatum) jouait un rôle clé, mais où la chance pouvait être influencée par la piété ou les rituels. Les empereurs, comme Auguste ou Domitien, se présentaient souvent comme favorisés par Fortuna, renforçant leur légitimité. Cependant, son caractère imprévisible rappelait aussi la fragilité du pouvoir, comme dans l’expression « Fortuna favet audaci » (la fortune favorise les audacieux). Héritage culturel L’influence de Fortuna s’étend bien au-delà de l’Antiquité : Littérature : Les poètes comme Ovide ou Juvénal évoquent sa roue pour méditer sur l’instabilité de la vie. Moyen Âge : La Rota Fortunae devient un motif chrétien, illustrant la vanité des ambitions terrestres, notamment dans l’œuvre de Boèce (Consolation de la Philosophie). Époque moderne : L’idée de « Dame Fortune » persiste dans l’art, la littérature et même les jeux de hasard, où la roue reste un symbole universel.
Thyrse
Dans la mythologie grecque, puis romaine, le thyrse (en latin thyrsus, du grec ancien θύρσος / thýrsos) est un grand bâton évoquant un sceptre. Probablement en bois de cornouiller, il est orné de feuilles de lierre et surmonté d’une pomme de pin. Dans certaines variantes, le lierre est remplacé par de la vigne, et la pomme de pin par une grenade. C’est l’attribut majeur de Dionysos, parfois repris pour Bacchus. La tige de férule peut être aussi le thyrse dionysiaque. « Thyrsus » by EasyVectors.com – [1]. Licensed under CC BY 2.5 via Wikimedia Commons.
Liber

Liber Liber Pater (le « Père Libre ») est un dieu romain associé à la vigne, au vin, à la fertilité, à la liberté et à la créativité. Il est souvent considéré comme l’équivalent romain du dieu grec Dionysos (ou Bacchus). Dans la religion romaine, Liber Pater était célébré pour son rôle dans l’agriculture, la fécondité et la libération des contraintes sociales. Attributs principaux : Protecteur des vignobles et de la production de vin. Symbole de liberté, tant personnelle que sociale (parfois associé à l’émancipation des citoyens romains). Lié aux plaisirs, à la fête et à l’inspiration artistique. Iconographie : Représenté comme un jeune homme couronné de lierre ou de vigne, tenant souvent un thyrse (bâton orné) ou une coupe de vin. Compagnons : Associé à Ceres (déesse des moissons) et Libera (sa parèdre, équivalent d’Ariane ou Proserpine dans certains contextes). Culte et célébrations : Liberalia : Une fête romaine célébrée le 17 mars, dédiée à Liber Pater. Lors de cette fête : Les jeunes hommes recevaient leur toga virilis, marquant leur passage à l’âge adulte. Des offrandes de gâteaux, de vin et d’encens étaient faites. Des processions festives et des rites liés à la fertilité avaient lieu. Triade plébéienne : Liber Pater formait une triade avec Ceres et Libera, vénérée particulièrement par les plébéiens, en contraste avec la triade capitoline (Jupiter, Junon, Minerve). Contexte mythologique : Origines : Liber Pater est une divinité italique ancienne, intégrée dans la mythologie romaine. Son assimilation à Dionysos/Bacchus a enrichi son culte avec des éléments grecs, comme les mystères dionysiaques. Textes anciens : Il est mentionné dans des sources comme : Ovide, Fastes : Décrit les Liberalia et le rôle de Liber. Tite-Live, Histoire romaine : Évoque le culte de Liber et son influence. Lien avec Bacchus : À partir du IIe siècle av. J.-C., Liber Pater est souvent confondu avec Bacchus, notamment après l’introduction des Bacchanales à Rome (rites parfois controversés, régulés par le Sénat en 186 av. J.-C.). Denier Vibia – Caius Vibius Pansa
Bacchus

Bacchus Bacchus est un dieu romain correspondant à Dionysos dans la mythologie grecque, beaucoup plus ancien. Les Romains l’ont adopté, comme beaucoup d’autres divinités étrangères dans la mythologie romaine, en l’assimilant avec le vieux dieu italique Liber Pater. C’est le dieu du vin, de l’ivresse et des débordements, notamment sexuels. Priape est un de ses compagnons favoris. Les fêtes de Bacchus s’appellent les bacchanales. La représentation de Bacchus est entièrement liée à son correspondant grec Dionysos. En effet, le terme « Bacchus » n’est à l’origine qu’un épithète qui qualifiait le dieu grec. L’introduction en Italie de Dionysos s’est faite par la translittération de cette épithète, depuis le grec Βάκχος, Bákkhos, en alphabet latin. Il reprend ainsi l’essentiel des attributs de son homologue grec dont il est issu. Bacchus par Le CARAVAGE (1596) © galerie des Offices de Florence. Denier Cassia – Lucius Cassius Longinus C’est le dieu de la vigne, de la fête et du vin. Il tient souvent à la main un thyrse, entouré de vigne et de lierre et est surmonté d’une pomme de pin. Le thyrse peut faire jaillir la vigne ou le lierre. Il peut s’incarner en taureau, en bouc et en serpent. La panthère, l’âne, le bouc, la patère, le canthare, le lierre, la vigne et la grappe de raisin sont les animaux et les objets qui lui sont associés. D’autres attributs ont été empruntés à Dionysos, comme le thyrse qu’il porte parfois. C’est le père du théâtre et de la tragédie.